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Pourquoi la parole des patients ou de leur famille est capitale et peut éviter le pire

6 mai

La directive Matha interpelle les habitants du Royaume Uni mais nous concerne tous.

Après la décès d’une adolescente suite à une mauvaise prise en charge : le système de santé du Royaume Uni, le NHS, introduit une directive, la « directive Martha » dans une centaine hôpitaux à partir d’avril 2024.

Que dit la directive Martha ?
Les trois composantes proposées de la directive Martha :

  • Le personnel de santé doit avoir accès 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 à un examen rapide par une équipe de soins intensifs s’ils ont des inquiétudes concernant un patient.
  • Tous les patients, leurs familles, leurs soignants et leurs défenseurs, s’ils s’inquiètent de l’état du patient, doivent également avoir accès au même examen rapide 24h/24 et 7j/7 par une équipe de soins intensifs qu’ils peuvent contacter dans les conditions que l’hôpital doit garantir.
  • Le NHS doit obtenir des informations relatives à l’état d’un patient directement auprès des patients et de leurs familles, au moins quotidiennement. Dans un premier temps, tous les patients hospitalisés dans des centres de soins aigus et spécialisés seront concernés.

Patients, ouvrez- la !

Pourquoi cette fillette est elle décédée ?

« des égos parfois démesurés et un paternalisme alimenté par une organisation hiérarchique favorisant le mandarinat » tuent tous les jours des patients incapables de se défendre.

Le récit de Merope Mills, la mère de Martha est important à plusieurs égards et il a motivé la rédaction de la directive Martha qui sera appliquée dès avril 2024 dans une première centaine d’établissements de santé du NHS.

Pendant ses vacances dans le pays de Galles, Martha, 13 ans, a fait une chute de vélo.
Un traumatisme au pancréas diagnostiqué sur place ; a justifié une prise en charge par un hôpital de recours.
Martha a rapidement été dirigée et admise dans l’équivalent d’un CHU français : le King’s College Hospital de Londres.

La mère de Martha, Merope Mills, l’une des directrices du quotidien « The Guardian » a relaté le cauchemar vécu par sa fille et par elle-même pendant cette hospitalisation.

En effet, une série d’erreurs médicales « choquantes » explique un transfert trop tardif dans la réanimation pédiatrique du même hôpital, situé pourtant au bout du couloir ou se trouvait la chambre de sa fille, alors qu’elle présentait tous les signes d’un grave sepsis (une septicémie grave).

Martha est décédée peu de temps après ce transfert.

L’enquête prouvera que :

1 - le médecin sénior a volontairement retardé le transfert tout en minimisant à plusieurs reprises la gravité du tableau clinique présentée par l’adolescente malgré les alertes répétées de sa famille.
Le récit est glaçant, la mère n’arrivant pas à convaincre les médecins - le sénior et les médecins de garde - de demander l’avis d’un réanimateur et de la transférer en réanimation devant la dégradation rapide de l’état de santé et l’apparition de symptômes qui pour elle, sont pourtant caractéristiques d’un sepsis.

Jusqu’à l’admission dans l’hôpital Londonien, la mère de Martha se félicitait de la rapidité des secours, des conditions du transfert et de l’accueil dans l’hôpital de recours.
Rapidement, l’apparition de fièvre et d’autres symptômes de plus en plus nombreux ont alertés les parents, inquiets également devant la perspective d’un week-end associé à une fête nationale (Bank holiday).

2 - Les signes ont été interprétés par la mère de Martha comme des symptômes typiques de sepsis grave, ce que les médecins ont réfuté en évoquant une réaction allergique aux antibiotiques.

3 - Aucun médecin n’est passé voire Martha la nuit suivante malgré les appels de sa mère.

4 - Les soignants ont voulu rassurer la mère de Martha en lui conseillant de ne plus aller consulter internet et de faire confiance à l’équipe médicale.
Suivre cette recommandation est, dans les mots de Merope Mills, une de ses plus grandes erreurs et génère désormais une culpabilité dévastatrice
.

Le témoignage de Merope Mills illustre bien chez certains professionnels de santé, les conséquences d’un « effet tunnel » expliqué notamment par des égos parfois démesurés et un paternalisme alimenté par une organisation hiérarchique favorisant le mandarinat.

La tragique histoire de Martha nous renvoie à celle de Lucas, toute aussi tragique et poignante qui raconte l’impuissance des parents ou des patients face à un système dur, souvent sourd et parfois mortel à force de rejet et de déni de la parole des patients.

Il aura fallu la mort de Martha pour que Le NHS prenne en compte la gravité du risque de ne pas assez écouter les patients et leur famille et reconnaisse l’intérêt et le droit à un second avis médical en cas de doute ou d’inquiétude de la part d’un patient, de sa famille ou de soignants.

et nous ?

Nous ?

La consigne de nos décideurs en santé « il faut désengorger les urgences » oui mais comment ?

Avril 2024, une patiente souffre de douleurs abdominales violentes ; vers 20 heures, son mari la conduit au centre hospitalier le plus proche sur avis du centre 15. Elle reste aux urgences et attend ; on lui fait passer une radio à trois heures du matin et on la renvoie chez elle à 4 heures du matin en lui disant qu’elle n’a rien, Elle se tord de douleurs , elle rappelle le centre 15 au petit matin et se fait répondre qu’elle a déjà été vue la nuit et qu’elle doit « se calmer », ne pas déranger le centre pour rien.
Résultat, syncope, samu, opérée en urgence, péritonite sur cholécystite aigue et 4 semaines d’hospitalisation. Cette personne a eu la vue sauve, ce qui n’est pas le cas de tous.

En octobre dernier, le calvaire vécu par le jeune Lucas, 25 ans, avant de décéder en état de septicémie, tenu éloigné de sa famille qu’il appelait au secours depuis son brancard, aux urgences du centre hospitalier de Hyères, à ce jour, n’a toujours pas fait bouger les lignes du système de santé.
" On ne lui donne le droit de voir un médecin que quatre heures après son arrivée. Ce dernier va l’ausculter une poignée de secondes en s’interrogeant s’il n’a pas fumé, car il a des dreadlocks » témoignait l’avocat de la famille.

On reste sans voix et on pleure notre impuissance.

Le LIEN revendique un droit pour tous à la sécurité aux urgences et un devoir d’humanité pour les professionnels et les établissements da santé.

Respecter le droit de chacun à pouvoir serrer une main aimante dans des moments douloureux et parfois au moment du dernier soupir est refusé. Au nom de quoi ?

Des cas comme celui de Lucas, des morts solitaires dans les couloirs d’urgence, c’est tous les jours en France aussi.
En mars 2023, depuis le début du mois de décembre précédent , le syndicat Samu-Urgences de France avait décompté le nombre de « morts inattendues » dans les services d’urgence, notamment car ces patients y auraient attendu trop longtemps. 150 personnes décéderaient ainsi chaque mois dans nos couloirs d’urgence.
Ce sont des « morts inattendues », soit parce que ces personnes sont décédées aux urgences après avoir attendu trop longtemps, soit parce qu’elles n’ont tout simplement pas pu y être prises en charge faute de moyens. Le syndicat Samu-Urgences de France (SUDF) en fait le décompte depuis le début du mois de décembre et abouti à ce chiffre de 150 par mois, selon une étude avec extrapolation.

France Assos Santé dont le LIEN est membre, a déposé plainte aux côtés de la famille de Lucas. Une enquête est en cours. Nous vous tiendrons au courant.

https://www.20minutes.fr/societe/40…

Sur la sécurité-patient consultez le site

https://www.securite-patient.fr

et apprenez à l’ouvrir !

Claude Rambaud

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